Un accord exprès sinon rien!
L’obligation de réintégration au retour d’une expatriation vient de prendre de nouveaux contours suite à l’arrêt de la Cour de Cassation en date du 21/11/2012.
A l’issue d’une expatriation l’entreprise d’origine a l’obligation de réintégrer son salarié et de lui proposer un poste et un niveau de rémunération équivalents à ceux dont il bénéficiait avant. En cas de refus par le salarié son employeur lui propose un autre poste ou le licencie.
Un salarié expatrié au Brésil depuis 1999, prend acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur (Cetelem devenue BNP Paribas Personal Finance) alors même que ce dernier lui avait proposé un poste (Responsable de la Direction de l’Internet) qu’il n’avait pas refusé.
La banque invoque :
La lettre de prise d’acte de la rupture date du 08/10/2007 alors que la prise de poste démarrait le 17/01/2007. Le salarié n’avait pas eu le temps d’appréhender les contours du poste.
De plus, sur la base de l'article L 1221-1 du code du travail, selon lequelle le contrat de travail s’exécute de bonne foi,la banque invoque que lors de sa réintégration, il appartient au salarié de faire clairement connaître sa position relative au nouveau poste.
Dans cette affaire, le salarié a donné tous les signes d'acceptation du nouveau poste. En effet, il a échangé des courriels avec son entreprise dans lesquels il l’interroge sur les démarches administratives à faire en vue de son retour. Il ne pose pas de questions sur le montant de la rémunération mais seulement sur la date de prise en charge de son salaire par la France.
La banque indique même que lors d’une réunion en date du 14/12/2006, réunion de la Direction Générale de Cetelem Paris, le salarié présente son projet de développement de l’internet dans un document de 21 pages : il donne les contours de l’activité de la Direction Internet Corporate à l’horizon 2010 et annonce la présentation à la fin janvier 2007 d’un plan d’action pour 2007.
En outre, le salarié perçoit en Novembre « sans réserve » une prime de retour en France de 27 500 Euros que la banque qualifie comme étant « exclusivement liée à l’acceptation de ses nouvelles fonctions. »
Enfin, la banque relève qu’à aucun moment il n’a manifesté de désapprobation avec ses nouvelles fonctions ; ses conditions de rémunérations ou ses conditions de retour en France.
Selon la banque le fait de ne pas avoir dit qu’il ne voulait pas de ce poste l’a privée de la possibilité de lui chercher un autre poste ou d’organiser son licenciement (conformément à la loi.)
Enfin, la banque invoque que le véritable motif serait l’acceptation par le salarié d’un poste de Direction dans une autre société au Brésil où il démarre le 9/2/2007.
Tout ces arguments sont sans effet aux yeux de la Haute Juridiction. L’attendu de la Cour de Cassation est sans appel ( !) :
« Mais attendu que …le salarié expatrié a fait l’objet d’une mesure de rapatriement en France sans bénéficier d’une offre de réintégration sérieuse, précise et compatible avec l’importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère, d’une part, qu’un accord exprès de l’intéressé sur ce nouveau poste n’était intervenu … que la prise d’acte de la rupture est justifié… »
Le terme « exprès » est crucial : l’employeur aurait dû recueillir l’accord exprès de son salarié pour ce poste , pas des signes d'acceptation tacite. L'absence de refus n'équivaut donc pas à une acceptation. En effet, le fait de mener une réunion pour présenter un projet de développement du département dont il aurait eu la direction ne peut être considéré comme un accord exprès, ni même le fait de recevoir la prime de retour et/ou d’échanger sur les modalités de son retour. La Cour de Cassation refuse de rechercher si la cause du refus ne serait pas plutôt dans l’acceptation d’un autre poste. Dès lors, il semble que la forme écrite soit celle qui pourrait le mieux répondre à cette obligation et prémunier l'employeur de ce type de procès.
Dans l’examen des moyens annexes la Cour précise que :
« aucun document produit n’établit une offre précise et sérieuse et un accord définitif sur les conditions de la réintégration de M. X … qui ne peuvent résulter de courriels internes entre ses supérieurs hiérarchiques relatant dans des termes lapidaires et inconsistants des accords verbaux de principe émanant de M.X. sur son prochain poste ; qu’en effet, aucune des pièces échangées n’établit d’engagement de la Banque notifié au salarié sur le montant du salaire fixe et variable de M. X … ni sur le statut exact du poste à créer et donc à définir précisément dans ses attributions et sa classification salariale , auquel il était affecté et en rapport avec les fonctions très importantes exercées au Brésil… que dans ces conditions, M.X., dont il avait mis fin aux fonctions en expatriation durable avec sa famille sur un autre continent et à qui il a été demandé de rejoindre un poste en France non défini et sans avoir fait d’offre sérieuse de réintégration précise et appropriée à sa qualification et son ancienneté au service de la banque, est fondé à opposer une rupture de son contrat de travail imputable à la banque ; qu’il sera par ailleurs observé que la direction Internet n’a pas été réellement créée … »
Les employeurs devront donc recueillir l’accord exprès –et écrit- de leur salarié de retour d’expatrié dans un document décrivant :
- Le poste et ses attributions,
la rémunération,
la classification salariale
…
En fait, tous les éléments constitutifs d'un contrat de travail.
Un « lu et accepté » devrait le prémunir de ce type de contentieux.
Dernière précision de taille : le montant total auquel la banque a été condamnée avoisine les 455.000 euros… De quoi inspirer plus d’un employeur me semble t-il…
Françoise Menou
Pour une lecture exhaustive de l’arrêt : Legifrance : http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000026670126&fastReqId=574843420&fastPos=1
Le salarié doit-il avoir préalablement travaillé pour la société mère avant son envoi à l'étranger?
Après ses deux arrêts du 13 novembre 2008, la Cour de Cassation (arrêt du 7 décembre 2011) vient à nouveau d'étendre l'obligation de rapatriement et de réintégration découlant de l'article 1231-5 du Code du Travail. Cet arrêt concerne un salarié qui n'avait pas travaillé pour la société mère antérieurement à son départ à l'étranger. Or l'article 1231-5 du Code du Travail présume de l'existence d'une période de travail au service de la société mère qui l'envoie à l'étranger.
" ... Mais attendu, d'abord, que le seul fait que le salarié n'ait pas, avant son détachement, exercé des fonctions effectives au service de l'employeur qui l'a détaché ne dispense pas celui-ci de son obligation d'assurer son rapatriement à la fin du détachement et de le reclasser dans un autre emploi en rapport avec ses compétences..."
Pour une lecture in extenso de l'arrêt de la Cour de cassation, chambre sociale.
Audience publique du mercredi 7 décembre 2011
N° de pourvoi: 09-67367
Article L1231-5
- Lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d’une filiale étrangère et qu’un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein.
Si la société mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables.
Le temps passé par le salarié au service de la filiale est alors pris en compte pour le calcul du préavis et de l'indemnité de licenciement.
La directive "permis unique" définitivement adoptée
Adoptée le 13 Décembre 2011, la Directive va permettre aux "... migrants des pays tiers travaillant légalement dans l'UE vont jouir de droits comparables à ceux des ressortissants de l'UE en matière de conditions de travail, de sécurité sociale et d'accès aux services publics, selon un nouveau "permis unique" adopté par le PE mardi. En outre, les formalités administratives seront réduites avec l'obtention, via une procédure unique, d'un permis de travail et de résidence. Les États membres auront 2 ans pour adapter leur législation aux nouvelles règles..."
Lire la suite sur la page Actualités du Parlement Européen.
"Le Parlement européen a définitivement adopté, le 13 décembre 2011, une directive établissant une procédure de demande unique en vue de la délivrance d'un permis unique autorisant les ressortissants de pays tiers à résider et à travailler sur le territoire d'un État membre et établissant un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans un État membre. Cette directive, qui devra être transposée dans les deux ans à compter de sa publication, prévoit que les titulaires d'un permis unique devraient bénéficier d'un ensemble de droits de base comparables à ceux des travailleurs de l'UE. Les formalités administratives seront réduites avec l'obtention, via une procédure unique, d'un permis de travail et de résidence. Ils pourront percevoir leur pension à leur retour au pays d'origine, aux mêmes conditions et aux mêmes taux que les ressortissants de l'UE."
- ulysse
- Samedi 17/12/2011
- 14:28
Une affaire de spécialistes
- ulysse
- Samedi 16/05/2009
- 20:07
Expatriés, connaissez vous les conséquences sur votre retraite future de vos périodes de travail à l'étranger?
Un projet de mobilité internationale peut s'inscrire dans un cadre individuel ou dans un cadre de mutation professionnelle. Dans les deux cas, on se préoccupe des implications à court terme : installation, conditions de vie et de rémunération sur place... Mais le long terme ne doit pas être négligé, en particulier la préparation à la retraite. Bien souvent, les règles de totalisation au niveau international ne permettent pas d'atteindre un niveau de retraite équivalent à celui que l'on aurait eu en restant en France.Des solutions existent, mais il faut anticiper.
Quelques précisions dans un article rédigé par Global Benefit Associates France.
Jurisprudence de Novembre 2008
- ulysse
- Mercredi 07/01/2009
- 11:23
L’article 1231-5 du Code du Travail met à la charge de l'employeur d'origine une obligation de rapatrier et de réintégrer un salarié licencié par la filiale au service de laquelle il a été mis à disposition.
Article L1231-5
- Lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d’une filiale étrangère et qu’un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein.
Si la société mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables.
Le temps passé par le salarié au service de la filiale est alors pris en compte pour le calcul du préavis et de l'indemnité de licenciement.
Cet article a toujours été appliqué aux situations dites d'expatriation au sens du Droit du Travail : suspension du contrat d’origine + conclusion d’un contrat local.
La Cour de Cassation, par deux arrêts du 13 novembre 2008, vient de changer la donne.
Dans la première affaire, une salariée d’un grand groupe français est mutée en Chine. Son contrat de travail français est rompu (et non pas suspendu) et un contrat local est conclu.
La salariée est licenciée par la filiale chinoise. Elle demande son rapatriement ce que son employeur refuse.
La Cour de Cassation décide : « Mais attendu que selon l’article … L 1231-5 du Code du Travail, lorsqu’un salarié mis par la société au service de laquelle il était engagé à la disposition d’une filiale étrangère à laquelle il est lié par une contrat de travail, est licencié par cette filiale, la société mère doit assurer son rapatriement et lui procurer un nouvel emploi compatible avec l’importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère ; que ce texte ne subordonne pas son application au maintien d’un contrat de travail entre le salarié et la maison-mère."
Cette lecture stricto sensu du Code Travail confère une protection supplémentaire au salarié qui pourra prétendre au bénéfice de l’article 1231-5 CT même après que son contrat de travail initial ait été rompu.
Cela vaudra t-il pour tous les transferts ? Seul l’avenir pourra le dire.
Dans la seconde affaire, un salarié est envoyé dans une filiale argentine. Ultérieurement, une partie du fonds de commerce de la filiale argentine est cédée et le personnel dont fait partie le salarié est transféré à la nouvelle entité en application du Droit argentin.
Le salarié demande son rapatriement. L’employeur le refuse arguant que l’article L 1231-5 concerne les cas de licenciements par la filiale et non de transfert de contrat.
La Cour de Cassation tranche : « … la cession par la filiale argentine de son fonds à une société tierce, mettait fin ipso facto au contrat de travail liant M. X… à la filiale argentine et qu’il s’en déduisait qu’il appartenait à la société mère de prendre l’initiative du rapatriement du salarié et de lui proposer un reclassement. »
Là encore la Cour de Cassation confère une protection additionnelle au salarié en étendant l'acceptation du terme de "licenciement" à des situations "connexes.
Ces deux arrêts montrent encore une fois le large pouvoir des juges au bénéfice des salariés. Ils montrent également la volonté de conserver à la charge des grands Groupes internationaux une responsabilité à l'égard de leurs salariés tant bien même ceux-ci seraient transférés de la mère vers une filiale et leur contrat de travail initial rompu. Reste à déterminer si la Cour continuera à exiger une réintégration 5 ou 10 ans après un tel transfert. En effet, le lien hiérarchique étant probablement distendu voire inexistant après une longue période, on peut se poser la question. L'autre interrogation consiste à savoir si la Cour poserait la même règle en présence d'une grosse PME n'ayant qu'une seule filiale à l'étranger.
En tout état de cause, les grands groupes devraient recenser dès à présent les contrats rompus lors d'un transfert à l'étranger et les classer dans les réintégrations potentiellement obligatoires.
F Menou
De l’article L 122-14-8 ancien Code du Travail à l’article à l’article L 1231-5 du Code du Travail.
Quels sont ces deux articles ?
ARTICLE L 122-14-8
Lorsqu’un salarié, mis par la société au service de laquelle il était engagé à la disposition d’une filiale étrangère à laquelle il est lié par un contrat de travail, est licencié par cette filiale, la société mère doit assurer son rapatriement et lui procurer un nouvel emploi compatible avec l’importance de ses précédentes fonctions au sein de la société mère.
Si la société mère entend néanmoins congédier ce salarié, les dispositions de la présente section sont applicables. Le temps passé par le salarié au service de la filiale est pris en compte pour le calcul du délai-congé et de l'indemnité de licenciement.
ARTICLE L 1231-5 CODE DU TRAVAIL
Lorsqu’un salarié, engagé par une société mère a été mis à la disposition d’une filiale étrangère et qu’un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l’importance de ses précédentes fonction en son sein.
Si la mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables.
Le temps passé par le salarié au service de la filiale et alors pris en compte pour le calcul du préavis et de l’indemnité de licenciement. »
Sous l'ancien comme sous le Nouveau Code du Travail il est nécessaire que la loi applicable au contrat soit la loi française. Il peut s'agir de la loi de l’avenant ou bien celle qui s’applique par l’effet de la Convention de Rome laquelle prévoit que le salarié bénéficie de l’application des normes impératives du lieu habituel d’exécution du travail dès lors qu’elles sont plus favorables que celles prévues par la loi applicable au contrat.
Sous l’égide de l’ancien Code du Travail on demandait que le salarié ait travaillé au sein de la société mère avant d’avoir été envoyé dans une filiale à l’étranger. Ceci afin qu’un lien organique entre le salarié envoyé à l’étranger et la société mère puisse existe.
Cependant une réponse Ministérielle JOANQ 27/04/1976, p. 2240 avait reconnu la possibilité d’ « admettre au bénéfice de ces dispositions ceux qui sont liés à la société mère par un contrat de travail et ont été envoyés par elle, sous certaines conditions, immédiatement après leur embauchage dans la filiale, tout en ayant conservé avec la société mère un lien juridique.»
De l’ancien texte découlait la nécessité que la société ait nécessairement une position dominante vis-à-vis de la filiale, sans que cette position dominante ne soit caractérisée clairement. Il fallait que la société d’origine puisse exercer un contrôle sur la société étrangère au sein de laquelle le salarié était mis à disposition. Encore une fois on voulait que le lien de subordination entre la société (mère) et le salarié envoyé à l’étranger subsiste. Le nouvel article, lui, ne concerne que les sociétés mères ce qui a l’avantage de la clarté.
La dernière condition est la même : le licenciement doit avoir été notifié par la filiale, quelqu'en soit le motif (économique ou personnel.)
Le nouvel article dépoussière heureusement les termes de la fin du texte :
on ne parle plus de « congédier » mais de « licencier » ; et le « délai congé » devient le « préavis. »
Comme par le passé la démission n’est pas mentionnée par ce texte. Ni les situations dans lesquelles le salarié est muté d’une filiale à une autre filiale. L’article ne concerne que le salarié et reste muet sur le sort des personnes accompagnant le salarié (conjoint et enfants.)
Peu de choses semblent avoir changé. Le texte est un peu plus clair.
Il est cependant utile de rappeler que cette double obligation, à la charge de la société mère, est une obligation a minima c'est-à-dire que le salarié en bénéficiera même si son contrat ou son avenant ne le mentionne pas pour peu que toutes les autres conditions soient réunies.
Dans l’hypothèse où la Directive du 14 octobre 1991 s’applique, un certain nombre de clauses doivent obligatoirement figurer au contrat notamment celles réglant la fin du contrat de travail.
Rien n’empêche la société mère de détailler les conditions dans lesquelles la fin de contrat aura lieu. Cela pourrait éviter un certain nombre de procès.
On ne peut pas choisir sa Sécurité Sociale.
La dispute n’est pas nouvelle et ceux qui s’intéressent à la question auront déjà vu sur Internet des sites relatant des expériences de français résidant et travaillant en France qui ont choisi de ne pas cotiser à la Sécurité Sociale française. Ils ont choisi une société étrangère de protection sociale au sein de l’Union Européenne.
Ceux qui découvrent la question ici même se demandent si cela est possible!
Je ne rentrerai pas dans la polémique qui comprend déjà un nombre suffisant d’acteurs.
Cependant, un jugement du Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale du Havre, rendu en date du 26 mai 2008, refuse cette option à tous ceux qui travaillent en France. La liberté de choix ne concerne que les Mutuelles et non le système de SS.
Ainsi donc se trouve confirmé le principe selon lequel, en matière de SS le principe de territorialité s’applique et seules les exceptions liées aux procédures détachement permettent d’y échapper.
Pour lecture : le texte européen 92/49 du 18 juin 1992, i nvoqué par ceux qui pensent que l’on n’est pas obligé de s’affilier à la SS.
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